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Jean-Pierre Sergent

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x 266 KARMA-KALI, SEXUAL DREAMS & PARADOXES | ÉTÉ & AUTOMNE 2024 | PAPIER RIVES BFK, 250g & 160g

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x 266 KARMA-KALI, SEXUAL DREAMS & PARADOXES | ÉTÉ & AUTOMNE 2024 | PAPIER RIVES BFK

Nouvelle série de 266 tirages uniques, acrylique sérigraphiée avec des rehauts à l'encre de Chine sur papier blanc (250g) & créme Rives BFK (160g), format 76 x 56 cm.


NOUVELLES CONJONCTIONS : UNE CARTOGRAPHIE DES MONDES CHOISIS, DES ÉNERGIES, DES SPIRITUALITÉS SOUHAITÉES, RÊVÉES & DÉVELOPPÉES DANS MON NOUVEAU TRAVAIL DE L'ÉTÉ 2024 [17 octobre 2024]
DIMENSIONS ARCHAÏQUES, PENSÉES ORGANIQUES, L'ENVELOPPÉ-ENVELOPPANT, LES GRAFFITTIS & LES PATTERNS

 

"L'aube se lève
et les fleurs ouvrent
les portes du paradis."

Saimu, "Poèmes d'adieu japonais (Poèmes écrits au seuil de la mort)", Yoel Hoffmann

"Le chemin de l'excès mène aux palais de la sagesse." William Blake



On peut regarder mon travail comme un immense graffiti, comme un palimpseste inoubliable et infini, une immense fresque, se déroulant sans fin, du début à la fin et dans laquelle, les successions d'images convoquées et sérigraphiées existent, avec leurs couleurs propres et particulières comme autant de notes musicales et de scènes orgiaques successives et vibratoires, comme les vagues scandées de l'Océan. C'est un ensemble, une communauté, un tapis d'informations, comme dans la Nature elle-même. 
Parfois, je mélange également des patterns, ces motifs-dessins géométriques, plus rationnels, structurés formellement, rationnellement, plus connotés culturellement et génétiquement que les images purement érotiques. Ces dessins sont autant de concepts, comme des 'filets' structurels englobants l'image érotique, parfois trop débordante et qui, paradoxalement, accentuent encore le côté voyeur de la jouissance-transe érotique. Cet enveloppé-enveloppant et ce voilé-dévoilé, est un jeu entre le spectateur et les images. En effet, un simple corps nu est, de facto, beaucoup moins érotique et érotisé, qu'un corps de femme nu paré de lingerie fine ou d'un fishnet stocking (le fameux bas résille) car, celui-ci, augmente et souligne les courbes et les formes, surajoute et objectivise, en quelque sorte, le corps de l'autre et paradoxalement, l'enferme, aussi, dans son entité d'objet désirable de proie, sur-transgressant aussi celui-ci, en l'enveloppant dans une dimension extérieure, dans un vortex abyssal universel, qui est bien au-delà de celui-ci… Situé en fait, paradoxalement, dans une errance, une désappartenance et une soumission aux désirs régénérateurs universels et éternels, lieu sacré par excellence…  
Il faut regarder globalement cet ensemble de créations et ces mélanges d'images, ce 'cela' indéfinissable, ces entités ; comme une prière, une offrande, une sollicitude, une présence orgasmique et spirituelle. Les couleurs ont la présence et la densité de cette couleur-ci et nullement de cette couleur-là. Et chacune d'entre-elle est un mélange accumulé au fil du temps de la création car, je les assemble et les mélange de manière unique, à l'instant T de l'impression, en prenant donc chaque fois, un ancien pot d'encre acrylique, datant encore parfois souvent, de mes années new yorkaises (donc, qui a plus de trente ans) et dans lequel, un bleu n'est plus un bleu mais un mélange d'une multitude de bleus, un assemblage, une agrégation, un conglomérat de bleus… Et, où un rouge, par exemple, est composé par des pigments de rouge de mars, de rouge de cadmium, d'oxyde de fer et de terre de sienne etc, avec chaque pigment ayant intrinsèquement aussi, une origine géographique et une composition chimique particulière. Imaginez-vous d'où provient la terre de Sienne ? Alors ainsi, chaque couleur imprimée a sa tonalité et sa composition chimique, sa résonance colorée propre et unique ! Ce travail sérigraphique d'accumulation, qui est aussi, parfois, assez fatigant physiquement, est toujours vécu comme un véritable combat à faire contre l'absurde et le néant et il avance, il se développe vers et dans la lumière et l'accession à une sorte d'état de satori* et de transe mystico-érotique, dans une annulation volontaire de l'ego, de tout apriori culturel et esthétique et de toute représentation figurative vulgaire, marchande ou pornographique. J'utilise de telles images porno, comme une base, à la façon d'un matériau primaire, comme des briques, assemblées au travers d'une technique véritablement tantrique, pour les nier, les détruire, les annihiler, les dépouiller, les conchier et les défaire de tous leurs contenus mercantiles, ostentatoires, pops, aguicheurs et vulgaires… Pour les tordre et les transmuter en une essence, une véritable énergie vivante, vitale et spirituelle, éruptant alchimiquement et chamaniquement en des déferlantes explosives de jaillissements de Vie pure… insurgés, éjaculatoires, insoumis, anarchiques et primordiales. Car, la connaissance de la 'vérité vraie' de l'œuvre est essentielle pour accéder à la 'présence vraie' de celle-ci. 
Mes travaux s'inscrivent dans le temps profond, grâce à ma technique du layering (ajouter et accumuler successivement, en superposition, une couche d'image sur une autre) et aussi, mélanger des couches d'encre de chine colorées avec les images, jusqu'à obtenir une peinture 'extatique' dans laquelle il s'émerge et se passe quelque chose : une présence, une lumière qui en jaillit peut-être …? Œuvres qui peuvent ressembler, également, à l'accumulation volontaire et successive de graffitis (où un autre exemple : à l'art pariétal), qui sont presque toujours dessinés et gravés collectivement sur des surfaces anonymes, anodines, sur des murs communs et cachés : toilettes publiques, murs inhospitaliers, neutres, laids, gris et vulgaires des Villes et des Banlieues ; surfaces devant lesquelles on va pisser et chier innocemment car le corps s'y libère et où sa présence essentielle est indubitable, indéniable et ineffaçable ! Lieux où les individus, les uns après les autres, s'expriment souvent  dans une extension corporelle érotique éjaculatoire : le dessin spermique, sans pensée précise, sans intention, totalement hors cadre esthétique, autre que ceux imposés par les nécessités du corps même, dans son dépassement et son déplacement géographique, social et spatial : sortir de la merde, de son odeur et de sa condition de pauvre mortel. Et aussi, également, dans un immense espoir de l'annihilation d'une souffrance, d'une solitude, d'un enfermement individuel : "Je peins donc je suis et je jouis !" et j'existe dans le plaisir et dans la rencontre avec mon désir et tous mes rêves érotiques surnuméraires… : "ET, JE VOUS ENMERDE TOUS !" Explosant enfin jouissivement dans l'autre, les vulves, les seins, les bouches ou les trous du cul… objets de fantasmes et lieux d'enchantements, d'effacements et d'épuisement final, comme dans l'orgasme… de cette souffrance et de cette solitude individuelle, dans ce mouvement vers un autre et un ailleurs fusionnels… Car il y a dans les graffitis, comme dans mon travail d'ailleurs, cette envie inextinguible de partager, de communiquer, de faire savoir : son angoisse devant la mort, son désir de jouissance et cette volonté, pour un homme, d'éjaculer, de se noyer dans d'innombrables et inquantifiables vulves, bien juteuses et bien mouillées mais aussi, dans le cosmos ou dans les rêves érotiques eux-mêmes pour, ainsi, retrouver une force primitive, une énergie archaïque, une raison de vivre pleine et entière, comme peut-être rêvée ? dans ses autres cultures d'antan, ses mythologies et ses spiritualités anciennes, qui étaient signifiantes et régénératrices, non seulement des Dieux et des Déesses mais aussi, des hommes et des femmes et qui sont, à ce jour, dans notre période contemporaine qui est presque pré-apocalyptique, bien abandonnées, oubliées et perdues à jamais ! Où sont donc passés Dionysos, Pan, Isis, le Bâ** et l'ânkh*** ou encore, plus près de nous, les Song Lines, les chants des pistes**** des aborigènes australiens ?

 

* Satori : « comprendre, réaliser » est un terme des bouddhismes qui désigne l'éveil spirituel. La signification littérale du mot japonais est « compréhension » Ce n'est pas une compréhension intellectuelle mais une compréhension directe.
** Le Ba : est une composante immatérielle des dieux et des êtres humains. Ce concept est traduit par le mot « âme » ou par l'expression « âme-Ba ». Le Ba est la représentation de l'énergie de déplacement, de dialogue et de transformation.
*** L'ânkh : croix de vie, clé de vie, est un hiéroglyphe représentant le mot ˁnḫ, qui signifie « vie » pour les anciens Égyptiens. (Wiki)
**** Le chant des pistes, Bruce Chatwin


KARMA1-KALI2, SEXUAL DREAMS & PARADOXES

"Quelle lumière hors la vie ? Est-Il dans ou hors de cette masse d'images ? […]
La transcendance exige - ta crainte d'être déchiqueté."3

L'Art se doit de sentir le foutre et le souffre ou les deux à la fois ! Sinon, il n'est que représentation fragmentaire et démonstrative de mémoires affectives et sentimentales de temps révolus et perdus à jamais. 
L'Art est le présent. Au même titre que nos rêves érotiques qui nous réintègrent, parfois bien malgré nous, dans l'incommensurable matrice englobante du Vivant. Dans le grand mécanisme : sexe-vie - naissance-mort : construction versus destruction. La fonction et le rôle même, précis et exact de la déesse Indienne Kali la Noire, féroce et régénératrice. Portant nue, langue rouge tendue hors de sa bouche et yeux exorbités, un collier de crânes de morts en jouissant sexuellement sur le corps de Shiva avec son Yoni grand ouvert, pour le détruire et le ressusciter. Un peu comme la déesse mère mexicaine Coatlicue ou Isis et Osiris… Ainsi que tout comme, dans chaque acte sexuel humain : création puis destruction de l'ego pour faire naître le plaisir, la jouissance, l'anéantissement.
Bien évidemment, le sexe et ses représentations dérangent car elles nous font percevoir le grand vide, le grand chaos organique des mécanismes comiques dont l'humain rêve, pendant ses nuits, lors de ces rêves de fusions éjaculatoires dans et avec l'autre, dont le sexe opposé et complémentaire est attendu et espéré : pour renaître ou faire renaître.
"Des milliers de fois auparavant - J'ai vécu dans la matrice d'une mère - J'ai pris plaisir à une grande variété de nourritures - Et je fus allaité à tant de seins maternels - Je naissais, et mourais de nouveau - Et continuellement, je renaissais une nouvelle fois."4 
Le sperme5, étant alors, non comme une souillure éjaculatoire mais comme un levain archaïque : réincarnations, transmigrations et transmissions immémorielles dans les myriades surnuméraires de Yonis, vulves accueillantes et complices.

Quelque part il faut, comme pour les énergies fortes, brutales et incompressibles du Karma et de Kali ; utiliser dans mon travail, cet état créatif de conjonctions, d'accumulations de forces corporelles, énergétiques, foutatoires. Pour ainsi bousculer mon état de mortel, ainsi que l'état ambiant d'une société capitaliste, matérialiste en plein déclin, en plein déshonneur et qui force et soumet chacun d'entre nous, chaque être vivant, dans un individualisme sombrissime, isolateur et destructeur.

Une image n'est bien sûr, intrinsèquement, qu'une représentation. Mais elle peut parfois, être la puissante révélation d'une nature organique plus violente, plus vraie et plus sauvage que le sujet représenté… Et l'accumulation d'images pornographiques, Eros informel et jouissif, mélangées et s'interpénétrant aux patterns répétitif, géométriques, structurés, scandés comme des mantras ; créé ou recrée notre paradoxe vital, notre ligne de vie incantatoire. 

Nous vivons et évoluons de facto, dans des cadres bien structurés par la ou les pensées religieuses ou athées, les contraintes économiques, esthétiques et morales… En ces temps de terrible révolution pour les femmes iraniennes et afghanes, pensons bien fortement à elles, amicalement et confraternellement : "Femme, vie, liberté !" Car il faut que le Corps ou les Corps, interagissent impérativement aujourd'hui, au sein de ces structures et ces dictats de soumission, pour les réformer et espérons les assouplir… Afin d'ouvrir une voie nouvelle, vers une liberté plus profonde, plus en harmonie fusionnelle, spirituelle et animiste avec toutes les Forces, toutes les Vérités du Vivant et de la Nature.

Et puis c'est aussi un ensemble ; une totalité : des Pierres… des Cerfs et des Âmes Humaines… voyageant dans l'infini. SILENTIUM EST6.

Jean-Pierre Sergent, Besançon le 17 novembre 2022

1  KARMA C'est l'action sous toutes ses formes, puis dans un sens plus religieux l'action rituelle. C'est aussi une notion désignant communément le cycle des causes et des conséquences liées à l'existence des êtres sensibles. Il est alors la somme de ce qu'un individu a fait, est en train de faire ou fera. 
2  KALI La "Noire" est, dans l'hindouisme, la déesse de la préservation, de la transformation et de la destruction. Celui qui la vénère est libéré de la peur de la destruction. Elle détruit le mal sous toutes ses formes et notamment les branches de l'ignorance comme la jalousie ou la passion. 
Journaux Indiens, Allen Ginsberg. p. 244
4  Garbha #4, 108 Upanishads, Martine Buttex
5  "Le sperme met l'hindou dans un état de jubilation mystique. Il en voit ses déesse couvertes." Un barbare en Asie, Henri Michaux

6  Silentium est : "C'est silencieux.", phrase d'un manuscrit du Moyen Âge