Discussion II avec Marie-Madeleine Varet - Œuvres de 1993 au présent
TRAVAUX DE NEW YORK 1993-2003
7 Skulls
7 Skulls, Brooklyn studio's, peinture acrylique, corde, anneaux, crochets & sérigraphie sur bande de cuivre, sur bois, 1993, 2.44 x 0.35 m
- JPS : Œuvre incantatoire, régénératrice...Comme chez les Asmats, régénérer la mort, dans la perpétuation génétique de la vie. Rapport aux ancêtres, aux cultures ancestrales, recréer le lien pour communiquer avec les ancêtres...!
- MMV : Retour à la Verticalité dans sa radicalité phallique. “Perpétuation génétique de la vie” … Semence. Fertilisation. Multiplicité faussement disparate des matériaux utilisés : de leur étreinte amoureuse naissent sept crânes (masques) chargés d’affects, comme autant de parures pour quelque cérémonie rituelle. Skulls ne met pas en avant l’apostrophe inquiétante et actuelle de la Mort envers les vivants stoppés brutalement dans leur insouciance joyeuse, mais le serein message d’outre-tombe d’un humain défunt, tout empreint de l’évocation du passé heureux de l’ancêtre. Sur-vivance. Im-mortalité.
[Le squelette du crâne est puissamment symbolique dans le caractère référentiel qu’il représente comme unité de mesure pour les différents canons instaurés au cours du temps artistique. Ainsi, la mesure des canons grecs commence au 5e siècle avant Jésus-Christ, période à laquelle le sculpteur Polyclète instaure le canon de 7 têtes et demi ! Flash-back vertigineux …]
Anima, Dolphin & Bear
Anima, Dolphin & Bear, peinture acrylique, sérigraphie sur Plexiglas, ficelle, plomb & jouets sur bois, 1993, 1.05 x 0.76 m
- JPS : Équilibre, déséquilibre du monde originel et des êtres sensibles et complexes : être humain, ours, dauphin... Basculement intemporel du vivant autour des axis mundi du présent ressenti.
Ces montages-assemblages en bois récupéré au bord de l'East River, sont les premières œuvres réalisées à New York. Elle sont prémonitoires de mes réflexions futures sur l'ouverture au monde, à la Nature et aux cultures non européennes.
- MMV : Bois flotté. Bouteille à la mer … Quel message échoué au hasard de rives improbables nous parlera-t-il d’Ulysse et de la Mer, des Sirènes et du chant du Désir ? L’objet tangue, vacille, géométrise et grise … au gré des vagues. Anima et bouts de ficelle, jouets de plomb, ours et dauphin … se recomposent autour de l’Axe sacré, Hic et Nunc. L'anima ressortit toujours à un système de relation érotique.
Le rêve de l'homme emprisonné
Le rêve de l'homme emprisonné, polyptyque, acrylique sérigraphiée sur Plexiglas & Plexiglas coloré, 1999, 1.40 x 2.80 m
1 & 2, Le rêve de l'homme emprisonné, LIC studio's, polyptyque, acrylique sérigraphiée sur Plexiglas & Plexiglas coloré, 1999, 1.40 x 1.40 m
- JPS : Petite série de dix peintures, réalisées dans le nouveau studio de Long Island City. Ces peintures sont une réflexion sur le sentiment de liberté au travers et par l'acte sexuel, versus le sentiment de limitation, d'inutilité, d'emprisonnement et de solitude que chacun de nous peut ressentir à certains moments précis de sa vie. Les visuels utilisés sont un texte de Sade extrait des 120 Journées de Sodome, un axis mundi cosmique directionnel Maya et quelques scènes érotiques dont une vulve de femme copiée d'un dessin shunga japonais.
- MMV : Fulgurance de l’Axis Mundi. Bras tendus “aux quatre horizons qui crucifient le monde” … Violence de la tension centrifuge d’une écriture carcérale (Sade) qui ébranle la double enceinte protectrice du tableau. En terre de Liberté, cauchemar de l’homme emprisonné. Contrepoint. Salvatrice, libératoire, obsessionnelle, démultipliée, béante, – la femme-vulve.
Icarus & Indian Names
Icarus 1996 & Indian Names 1999, polyptyques, acrylique sérigraphiée sur Plexiglas & Plexiglas coloré, 2.40 x 2.40 m
- JPS : Ces deux grandes peintures de 2,40 m de coté ont été présentées lors d'expositions New Yorkaises.
- Icarus à été réalisé spécialement pour l'exposition Suspended Time, à l'Alliance française. Cette peinture présente un grand texte très érotique de Georges Bataille, issu de l'Histoire de l'œil, superposé devant des images ayant été collectées lors de voyages dans des sites naturels et dans la nature : photos d'animaux, rivières, plantes, vieux moulin, corrida etc...
- Indian Names, a été réalisé pour l'exposition Nomad Territories, à la DFN Gallery, c'est également un grand format dont le texte énumère une multitude de noms de chefs guerriers et de medecin men Indiens, tels que Géronimo, Cochise, Sitting Bull, Chief Josef, etc...
Cette peinture est un hommage, un mémorial à la gloire des hommes, des pensées et des cultures amérindiennes, pour lesquelles j'ai la plus grande admiration philosophique, esthétique et mystique. Ces hommes ont été de grands guides spirituels...
- MMV : * Icarus allégorique dans le Temps Suspendu d’une exposition New Yorkaise.
Le thème du damier s’intériorise. De cadre, il devient centre, croisée des chemins, délimitation axiale en quatre champs faussement autonomes, inextricablement unis par leur inscription dans la trame même du récit érotique qui les soutient.
Entrechoquement des énergies centrifuges et centripètes : l’envol d’Icare vers le Soleil où brûlent ses ailes de cire, se résout dans la chute et le retour à la Terre-Mère-Nature.
* Indian Names en Territoires nomades. Une mélopée âpre et lancinante … des noms pour ensemencer le sol des ancêtres et la mémoire des hommes.
Réitération / affirmation de l’Axe sacré intérieur, singularisé ici par un damier aux couleurs primaires – rouge, jaune, noir, bleu – qui sont celles de la transe chamanique.
Dans sa Prière à la Terre, la voix de Black Elk, chaman des Sioux Oglalas, s’élève et résonne singulièrement dans cette œuvre majeure de JPS :
[…] “Tu as placé les pouvoirs des quatre coins de la terre de façon à ce qu’ils se croisent. Tu m’as fait traverser la bonne route et la route des difficultés, et là où elles se croisent, l’endroit est sacré. Jour après jour, pour l’éternité, tu es la vie des choses.”
Axis Mundi …
LA SÉRIE DES MAYAN DIARY
2 x Mayan Diary, polyptyque, acrylique sérigraphiée sur Plexiglas, 2001 & 2008, 1.40 x 1.40 m
Mayan Diary, installation murale dans l'atelier de LIC, polyptyque, acrylique sérigraphiée sur Plexiglas, 2000, 1,40 x 5,60 m
- JPS : La série des Mayan Diary, comprenant au total cent soixante-neuf peintures sur Plexiglas, a été commencée à New York durant l'année 2000 et terminée à Besançon en 2010. C'est un travail qui m'a été largement inspiré par les rencontres faites durant mes voyages au Mexique et au Guatemala. Pays où j'ai découvert des cultures, des énergies et des couleurs étrangères pour moi jusqu'alors et qui m'ébranlèrent physiquement, comme un électrochoc me rendant la vie et m'ouvrant les yeux à une vitalité que je cherchais intérieurement et désespérément dans le tunnel noir et profond de la pensée et de l'art occidental. Paul Gauguin, Antonin Artaud et Henri Michaux, avaient déjà rencontré ces énergies magiques, mais en faire l'expérience physique fut une sorte de dépucelage mystique et éblouissant !
- MMV : Mexique. Second éveil. Re-naissance – intellectuelle, esthétique, sexuelle. L’archaïque et le mystique confondent leurs énergies.
Sous l’égide de Quetzalcóatl ("Serpent à Plumes" dans la langue Nahuatl), l'un des dieux créateurs de l'univers. Les Aztèques le vénéraient comme créateur de la race humaine, héros de la culture, dieu de Vénus et du vent. Les Mayas l’adoraient sous les noms Kukulkan et Gukumatz, comme dieu créateur et héros de la culture, mais particulièrement comme Dieu de Vénus et de la Guerre.
Apologie de la puissance mâle, guerrière et sexuelle.
La sublime Lady of the Ants se dédouble, ouverte comme une fleur, offerte à son “autre” symétrique inversée dans la main tendue, dupliquée / confrontée … Mènent-elles malicieusement l’une contre l’autre une guérilla sans reproche ? Luxuriance de la forêt et de la nudité secrète …
S’imposent ces vers d’un poème (“Song”) d’Allen Ginsberg, extraits du recueil Howl :
Les corps chauds
brillent ensemble
dans l'obscurité,
la main s'avance
vers le centre
de la chair,
la peau tremble
de bonheur
et l'âme vient
joyeuse à l'oeil -
oui, oui,
c'est ça
que je voulais,
que j'ai toujours voulu,
j'ai toujours voulu,
retourner
au corps
où je suis né.
TRAVAUX DE BESANÇON 2006 - ACTUELLEMENT
- JPS : Aujourd'hui je travaille dans mon atelier de Besançon sur l'élaboration de deux nouvelles séries :
les Suites entropiques, dont j'ai déjà réalisé quatre-vingt peintures sur Plexiglas et les Mangas, Yantras Y Otras Cosas, des petites éditions sérigraphiées sur papier, dont j'ai imprimé plus de deux cents exemplaires.
Les thèmes de ces deux séries se recoupent et sont principalement des thèmes érotiques et spirituels. J'utilise largement l'image érotique, car elle peut créer et provoquer un transfert puissant, immédiat et presque magique du plaisir chez le spectateur. Toutes les émotions humaines étant liées au plaisir ou au déplaisir, donc à la jouissance ou à la souffrance, ma décision univoque de provoquer le plaisir et l'émerveillement du spectateur devant la beauté, l'extase sexuelle et spirituelle, est chez moi un principe de travail et une décision irrévocable !
Gribouillis, Bôndage et Géométrie Sacrée
Impression de la sérigraphie sur Plexiglas : Gribouillis, Bôndage et Géométrie Sacrée, 1998, 1,50 x 3m, entreprise Mignotgraphie pour l'exposition à la Galerie du Pavé dans la marre, Besançon.
Gribouillis, Bôndage et Géométrie Sacrée, 1998, encre sérigraphiée sur Plexiglas, 2008, 1.50 x 3 m x 8 mm
B-ndage & Freedom, encre sérigraphiée sur papier, 2008, 1.50 x 3 m
- JPS : La réalisation de ces très grands formats (3 x 1.50 m) a été un vrai challenge artistique, car ces œuvres ont été imprimées hors de l'atelier à la société Mignographie qui possède une immense presse à sérigraphier. Ces œuvres on été créées spécialement pour l'exposition Kundalini, Dionysos & Rythmes Cosmiques à la galerie du "Pavé dans la Mare" de Besançon en 2008. La grande peinture sur Plexiglas Gribouillis, Bòndage et Géométrie Sacrée a été également présentée au MBA de Mulhouse en 2011 et la grande œuvre sur papier Bòndage & freedom, a été exposée au printemps 2013 pour l'exposition Sex & rituals, à la galerie "Omnibus" de Besançon. On peut dire que vu le thème évoqué, cette œuvre ne laissa personne indifférent. En effet ce grand corps de femme japonaise imprimé dans une couleur bleu violet (un peu mystique, ref : la déesse Kali bleu) sur un fond blanc immaculé, emprisonné dans ces liens de cordes tendus avec le visage transformé par l'extase sexuelle provoquée par le shibari (attaché, lié) ou le bôndage japonais, est une œuvre à la présence forte, indéfinissable et parfois troublante...
– MMV : La Kundalini … flux d’énergie vitale qui soutient la vie du corps humain et celle de l’Univers. Le Divin Dionysos … enivrant, végétal et charnel, couronné de pampres, tenant le thyrse, le canthare, la ciste mystique, il chevauche un bouc ou une panthère apprivoisée. La voix de Bacchus retentit : Evios des bacchanales. Rythmes cosmiques, éternel retour, temps cyclique, puissance flamboyante du désir immémorial où la déesse bleue triomphe de ses liens … ouverte, offerte, libre. Foudroyante beauté de cette œuvre iconoclaste, atemporelle, universelle et si singulière.
LA SÉRIE DES SUITES ENTROPIQUES
2 x Suites entropiques, polyptyque, acrylique sérigraphiée sur Plexiglas, 2011, 1.40 x 1.40 m
- JPS : Durant l'été 2011 j'ai commencé à travailler sur cette nouvelle série intitulée les Suites Entropiques* qui est la continuation directe de la série précédente des Mayan Diary (peintures de mêmes formats, mêmes matériaux, même technique et pouvant être assemblées avec les peintures des Mayan Diary dans un jeu d'assemblage mural).
*"L'entropie mesure le degré du désordre d'un système physique; le nombre de réarrangements des constituants fondamentaux ; les ratios de l'ordre et du chaos et donc par extension, du rationnel avec l'irrationnel, de la structure géométrique et de l'exubérance organique... "
Je pense que mon éloignement géographique de New York et du continent américain, m'a un peu désorienté affectivement et spirituellement, et toutes les forces primitives qui m'influençaient et me nourrissaient fortement jusqu'alors comme les cultures ancestrales mexicaines et nord amérindiennes ont peu à peu perdu de leurs importances pour laisser place aux images érotiques des mangas japonais et surtout à toute l'iconographie indienne : yantras et patterns répétitifs hindous, en y ajoutant de plus les concepts philosophiques du vide métacosmique et de la conscience métaphysique ! Il se trouve de fait que je suis actuellement physiquement géographiquement plus proche de l'Asie que je ne l'étais en vivant à New York. Il m'a alors semblé intéressant de renommer mon travail précédant de Mayan Diary (journal maya) en Suites Entropiques, titre impliquant nommément un arrangement visuel d'informations iconographiques disparates, contradictoires, dissonantes, anachroniques et conflictuelles, pour ainsi créer une zone picturale de chaos ou d'harmonies de grande entropie, donc dit un peu plus simplement et autrement : de grande énergie cosmique !
– MMV : Écriture syncopée d’une œuvre “en exil” … Entre deux continents, mystère de la terre native, retour à Ithaque déchiré/déchirant … Le triptyque fracture et réunifie la spirale sacrée. Désordre et chaos. Entropie et tropisme. Tropique du Cancer … “arrangement visuel d'informations iconographiques disparates, contradictoires, dissonantes, anachroniques et conflictuelles”, réconciliées dans la puissante énergie cosmique. Résolution des antinomies de l’Univers.
Axis Lundi, angulaire, triangulaire, solaire … l’œuvre “en jaune” déploie ses arbres, rameaux, fleurs et papillons. Éveil de la conscience.
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