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Jean-Pierre Sergent

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NOTES BESANÇON [2025], EXTRAITS, FLORILÈGES & MORCEAUX CHOISIS

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NOTES BESANÇON 2025


Je commence à écrire cette page, en février 2025 seulement car je suis très occupé par l'organisation et la communication pour une nouvelle exposition à la galerie Keller, que mon amie Heidi Suter, vient d'ouvrir au Centre Ville de Besançon. Bien que je lise toujours autant, je n'ai pas pu, malheureusement, prendre le temps de scanner les nouveaux passages des livres lus l'an dernier et je ne sais pas, quand je pourrai à nouveau prendre ce temps là. En attendant, voici quelques petits passages d'extraits trouvés dans les livres lus ou ailleurs,

Bien cordialement,

Jean-Pierre Sergent, Besançon, le 11 février 2025


– POÉSIE : LE TEMPS QUI PASSE, ANDRÉ GIDE

 

Le temps s’est écoulé comme une rivière , je ne l’ai pas vu passer ! Je viens de compter mes années et j’ai découvert qu’à partir de maintenant, j’ai moins de temps à vivre que ce que j’ai vécu jusqu’à présent… Je me sens comme ce petit enfant qui avait gagné un paquet de bonbons : le premier, il le mangea avec plaisir mais quand il s’aperçut qu’il ne lui en restait que très peu, il commença réellement à les savourer profondément ! Je n’ai plus de temps pour supporter des gens stupides qui, malgré leur âge chronologique, n’ont pas grandi. Je n’ai plus de temps pour faire face à la médiocrité, la méchanceté gratuite, la perversité. Je veux vivre à côté de gens humains, très humains. Qui savent rire de leurs erreurs… Qui ne se sentent pas élus avant l’heure et qui ne fuient pas leurs responsabilités. Qui défendent la dignité humaine et qui veulent marcher à côté de la vérité et l’honnêteté. L’essentiel est ce que tu fais pour que la vie en vaille la peine… Je veux m’entourer de gens qui peuvent toucher le cœur des autres… Des gens à qui les coups durs de la vie leurs ont appris à grandir avec de la douceur dans l’âme. Oui… je suis pressée de vivre avec l’intensité que la maturité et la bienveillance peuvent m’apporter. J’ai l’intention de ne pas perdre une seule partie des friandises qu’il me reste… Je suis sûr qu’elles seront autant, sinon plus exquises que toutes celles que j’ai mangées jusqu’à présent - personne n’y échappe riche, pauvre intelligent, démuni…!!!!!! 


– LIVRE : VISION ET PRIÈRE, DYLAN THOMAS

Ma note manuscrite écrite sur la première page de ce superbe livre : "Je cherche des points de correspondance pour relier les extrémités des multiples Univers…" (livre à scanner bientôt !)

 

La description d'une pensée ou d'une action - aussi abstruse soit-elle - peut être rendue familière en la rapportant au niveau physique. Toute idée intuitive ou intellectuelle peut être imagée et traduite en termes de corps - chair, peau, sang, muscles, veines, glandes, organes, cellules ou sens. Lettres choisies P. 141

 

– INTERVIEW : LE PROPHÉTISME D'ALDOUS HUXLEY : "JE SUIS ASSEZ TERRIFIÉ DE VOIR MES PROPHÉTIES RÉALISÉES", 1961, LES NUITS DE FRANCE CULTURE 

 

- Aldous Huxley : Et je dois dire que quand je vois des enfants figés devant un écran de télévision, j'ai eu une impression horrible de gens qui ont une addiction, exactement comme une addiction à l'opium.

Journaliste : Philosophiquement, Vous êtes individualiste alors ?

- A.H. : Oui, par nécessité.

- J. : Par nécessité ?

- A.H. : Par nécessité mais après tout, même si on est non individualiste, si on s'intéresse à la société mais, quelle est la valeur d'une société composée d'individus nuls? C'est là le danger que nous pouvons faire avec une espèce de compresseur, éliminer les idiosyncrasies individuelles, pour créer quoi ? Une société peut-être stable, mais même ça, j'en doute mais, une société stable mais complètement inintéressante et sans valeurs. Après tout, les valeurs sont nécessairement dans l'individu.

- J. : Vous avez fait une critique assez sévère de la télévision comme moyen de communication et de nivellement justement des personnes. Est ce que vous croyez que ce moyen de communication contribue à baisser, disons, le niveau de liberté ou d'individualisme ?

- A.H. : En général, je trouve oui ; je vois assez rarement la télévision mais je trouve que la plupart des programmes sont au fond purement des distractions. Ils font que les gens ne font pas attention, ne font pas attention aux choses importantes, mais seulement à ces espèces de fictions assez idiotes.


– REMARQUES DE PAUL DIRAC SUR DIEU ET LA RELIGION (1927)

 

Si nous sommes honnêtes - et les scientifiques doivent l'être - nous devons admettre que la religion est un amalgame d'affirmations fausses, sans fondement dans la réalité. L'idée même de Dieu est un produit de l'imagination humaine. Il est tout à fait compréhensible que les peuples primitifs, qui étaient tellement plus exposés aux forces écrasantes de la nature que nous ne le sommes aujourd'hui, aient personnifié ces forces dans la crainte et le tremblement. Mais aujourd'hui, alors que nous comprenons tant de processus naturels, nous n'avons plus besoin de telles solutions. Je ne vois pas du tout en quoi le postulat d'un Dieu tout-puissant nous aide. Ce que je vois, c'est que ce postulat conduit à des questions aussi improductives que celle de savoir pourquoi Dieu permet autant de misère et d'injustice, l'exploitation des pauvres par les riches et toutes les autres horreurs qu'il aurait pu empêcher. Si la religion est encore enseignée, ce n'est nullement parce que ses idées nous convainquent encore mais simplement, parce que certains d'entre nous veulent garder les classes inférieures tranquilles. Les gens soumis sont beaucoup plus faciles à gouverner que les gens bruyants et mécontents. Ils sont également beaucoup plus faciles à exploiter. La religion est une sorte d'opium qui permet à une nation de se bercer de rêves et d'oublier les injustices commises à l'encontre du peuple. D'où l'alliance étroite entre les deux grandes forces politiques que sont l'État et l'Église. Toutes deux ont besoin de l'illusion qu'un Dieu bienveillant récompense - au ciel, sinon sur terre - tous ceux qui ne se sont pas insurgés contre l'injustice, qui ont fait leur devoir tranquillement et sans se plaindre. C'est précisément la raison pour laquelle l'affirmation honnête que Dieu est un simple produit de l'imagination humaine est considérée comme le pire de tous les péchés mortels.


Extrait d'une lettre récente à un ami : C’est la vie d’artiste mon cher ami, c’est beau mais c’est triste ! Et on a parfois l’impression, que même le Soleil est triste et noir pour les artistes, bien que nous soyons, de facto, au centre de ce même Soleil et rayonnons malgré nous !


– À PROPOS DE WILLIAM BLAKE PAR KATHLEEN RAINE

 

Davantage qu'à ses dons de prophète, de peintre, de poète, de graveur et même, dit-on, de compositeur, c'est à l'extrême richesse de son être que William Blake doit sa nature exceptionnelle car, ce qu'il fut, représente bien plus que ce qu'il réalisa. Rares sont les créateurs qui parviennent à élaborer un Monde ayant sa réalité, sa cohérence et son atmosphère propres. Shakespeare, Dante, Dürer, tout comme Fra Angelico, Claude Lorrain et Michel-Ange, les peintres favoris de Blake, nous ont ainsi offert ces fragments d'Univers qui est l'un des plaisirs inhérents à cette forme d'art. Blake était l'un de ces créateurs et son œuvre, ainsi qu'il le pensait, représente des « fragments d'éternité » perçus par une imagination de visionnaire. Il parle également d' « Images éternelles » que « l'Oeil imaginatif de chacun peut saisir selon la position qu'il occupe », qui constituent un univers collectif et archétypique qui nous paraît plus vraisemblable aujourd'hui que de son temps. « Comme tout le reste, cet univers revêt des aspects qui diffèrent selon les individus. » C'est à un niveau plus profond que l'expérience personnelle du peintre ou du poète qu'il faut chercher les racines de cet Art, qui fait écho à une même profondeur chez le spectateur. Ainsi s'explique, en surface, « l'obscurité » de l'art visionnaire et, en profondeur, sa luminosité.

 

– [FIN DU TEXTE CORRIGÉ]

– INTERVIEW PIERRE MICHON AU SUJET DE SON LIVRE : "J'ÉCRIS L'ILIADE",  LA GRANDE LIBRAIRIE AVEC AUGUSTIN TRAPENARD LE 12 FEVRIER 2025

« - AUGUSTIN TRAPENARD : Parce que votre livre, il ne parle que de ça, au fond, il ne parle que de désir et d'écriture. De jouissance jusqu'à l'orgasme ?  
- PIERRE MICHON : Oui. Qu'est ce que le langage humain ? En quoi il le rend supérieur aux autres ? C'est qu'il le rend conscient de deux choses : la mort et le désir. Et l'homme, par ses facultés intellectuelles, a développé de façon délirante l'activité sexuelle. Aucun animal n'est obsédé par par la jouissance comme nous le sommes, nous autres humains. »


– ARTICLE : ARCHAEO - HISTORIES BY HELLENIC GLORY (MELBOURNE’S HELLENIC MUSEUM, AUSTRALIA) LE 18 FÉVRIER 2025

The clothes of Minoan women were surprising with their style and variety of patterns. Greek women of later times wore clothes with completely different stylistic solutions. The exposed breasts were a characteristic feature of the dress of Minoan and Mycenaean women.
Nudity, partial or full, was common in the Bronze Age Mediterranean - just have a look at Egyptian art, for instance. Back then, the human body simply didn't have the level of shame associated with it that came with later cultures and religions. But when the priestesses of ancient Crete bared their breasts in a ritual setting, that act may have had deeper meaning as well. We think its purpose was to remind everyone of the role that human and animal mothers play in the nurturing and nourishing of their offspring, and thus of the way in which Great Mother nourishes us all. Think, for instance, of the Milky Way, that pale white spattery streak across the sky that's visible to those of us who are lucky enough not to be stuck in light-polluted areas. Many ancient cultures, including the Minoans, believed the Milky Way was formed when the Great Mother’s milk spurted in response to her baby’s crying (this actually happens in real life to nursing mothers, with predictable soggy-clothing results). On Crete, that Great Mother was Rhea, and her baby was infant god Dionysus.

 

– INTERVIEW TV : PATRICK CHAMOISEAU "QUE PEUT LITTÉRATURE QUAND ELLE NE PEUT ?" LA GRANDE LIBRAIRIE, 19 FÉVRIER 2025

"l'état poétique" comme force de résistance face aux puissances de domination. 

Toutes les formes de domination portent atteinte à la créativité de l'homme. Pourquoi ? Parce que toutes les formes de domination déshumanisent et réduisent l'homme au prosaïque, c'est à dire, mon manger, mon boire, ma survie, etc. Et quand on est limité au prosaïque, on devient pratiquement quelque chose d'inerte, on n'a plus la force de l'esprit et de la créativité. Le poème, est une stimulation esthétique, qui vous touche la totalité de la perception, qui vous modifie les amplitudes de votre imagination et qui libère votre imaginaire. Et qu'est ce que ça fait ? Ça vous met dans un état poétique. On quitte le côté prosaïque et on bascule, dans ce qui fait l'humain, qui est la dimension poétique de l'humain. C'est l'amour. L'amour, c'est l'amitié. C'est quoi l'amour ? L'amour, c'est une stimulation existentielle majeure. Quand on tombe amoureux, on a une amplitude à la fois du corps et de l'esprit, de la perception, de l'audition. On est ouvert à la totalité du Monde. Et si à ce moment là, on écoute un poème, on reçoit un poème, il y a une déflagration absolument incroyable qui amplifie votre amour. Alors, vous comprenez ce que je dis fondamentalement, contre les dominations, développons l'état poétique et pour développer son état poétique, il faut augmenter les stimulations esthétiques et artistiques. Les politiques culturelles sont les plus importantes aujourd'hui. Chaque fois que le capitalisme et chaque fois que ce genre de monstres apparaissent comme ça dans nos démocraties, il ne faut pas les laisser réduire les politiques culturelles. Parce que quand les politiques culturelles se réduisent, l'état poétique général va s'abaisser, la créativité va disparaître et on ne va plus exister, on ne va plus exister, On va peut être résister, mais résister, c'est prosaïque. Exister, c'est au delà de la résistance, c'est à dire qu'on s'ouvre dans ce qu'il y a de plus puissant dans l'humanité.

 

– LIVRE : MÉMOIRES D'HADRIEN, MARGUERITE YOURCENAR

Je ne méprise pas les hommes. Si je le faisais, je n'aurais aucun droit, ni aucune raison, d'essayer de les gouverner. Je les sais vains, ignorants, avides, inquiets, capables de presque tout pour réussir, pour se faire valoir, même à leurs propres yeux, ou tout simplement pour éviter de souffrir. Je le sais : je suis comme eux, du moins par moment, ou j'aurais pu l'être. Entre autrui et moi, les différences que j'aperçois sont trop négligeables pour compter dans l'addition finale. Je m'efforce donc que mon attitude soit aussi éloignée de la froide supériorité du philosophe que l'arrogance du César. Les plus opaques des hommes ne sont pas sans lueurs : cet assassin joue proprement de la flûte ; ce contremaître déchirant à coups de fouet le dos des esclaves est peut-être un bon fils ; cet idiot partagerait avec moi son dernier morceau de pain. Et il y en a peu auxquels on ne puisse apprendre convenablement quelque chose. Notre grande erreur est d'essayer d'obtenir de chacun en particulier les vertus qu'il n'a pas, et de négliger de cultiver celles qu'il possède.


– ÉMISSION TV : DEUX FRANCE IRRÉCONCILIABLES : "MÉTROPOLIA ET PÉRIPHÉRIA" DE CHRISTOPHE GUILLUY, LE CLUB FIGARO IDÉE, MARS 2025

 

«Il y a un assèchement de la pensée en métropole. Les productions cinématographiques ou littéraires sont mauvaises parce qu’elles ne sont plus connectées à la multitude sociologique, ce qui faisait la richesse des œuvres de Balzac ou Dostoïevski»

La production culturelle à 'métropolia' devient très problématique. C'est à dire que quand vous regardez la question culturelle qui est fondamentale dans tout ça. Moi je vois, par exemple, un effondrement du cinéma, un effondrement, on pourrait dire aussi de la littérature. Tout ça n'est pas terrible quand on regarde les choses. Pourquoi ? Je crois qu'une société n'est viable que si elle est connectée à la multitude. Quand vous regardez la grande littérature d'hier. Je parle très souvent de Dostoïevski mais on pourrait parler de Céline. C'est quoi ces grands auteurs ? Ce sont des gens qui pensent le monde connecté. Dostoïevski, c'est une connexion infinie avec la paysannerie russe. Comment Céline construit son œuvre ? en faisant entrer dans son cabinet médical des gens ordinaires. Bref, cette connexion là, permet de produire les plus grandes œuvres et l'assèchement de la pensée, y compris universitaire, c'est exactement ça, ce sont des gens déconnectés, totalement, de ce qui est pour moi la sève des sociétés, c'est à dire des gens ordinaires et de la multitude, parce que c'est là que sont aussi les valeurs humaines. Et moi, dans ce genre de réflexion, à la Béliard, il y a vraiment quelque chose qui est de l'ordre d'un effondrement intellectuel et culturel, c'est à dire de l'incapacité à penser l'autre, mais le vrai Autre, pas celui qu'on mythifie, parce que justement, le vrai autre, c'est celui qui vit dans cette autre planète.


Jean-Pierre Sergent, Besançon le 14 mars 2025


AUTRES LIVRES LUS EN 2025

– LE SILENCE FOUDROYANT, LE SOUTRA DE LA MAÎTRISE DU SERPENT, THICH NHAT HANH

–  LE DIT DU VIEUX MARIN, SAMUEL TAYLOR COLERIDGE

– EXTINCTION, THOMAS BERNHARD

– TRISTESSE ET BEAUTÉ, YASUNARI KAWABATA

– KAWABATA-MISHIMA, CORRESPONDANCE

– LA PESENTEUR ET LA GRÂCE, SIMONE VEIL (superbe et important livre !)

– LE ROMAN DE L'ANNEAU, PRINCE ILANGÔ ADIGAL, TRADUIT PAR ALAIN DANIÉLOU